TREK IN THE COUNTRY

Publié le par theworldnextdoor

Trek Kalaw-Indein. 1er jour

22/09/2011
Par Steph.

9912-Trek Kalaw/ Indein jour 1Comme d'habitude, malgré une bonne nuit de sommeil, nous ne sommes pas à l'heure au rendez-vous avec Aung Aung. 15 min après 9h. Nous avons pris le temps de petit-déjeuner car nous nous attendons à quelques belles heures de marche éprouvantes. Notre guide nous attend, toujours aussi souriant que la veille. Il est vêtu de son Jean, d'un t-shirt à manches longues, d'une paire de patogaz montantes et d'un drôle de chapeau colonial en palme. Avec sa mèche rebelle qu'il remet régulièrement en place d'un coup de tête, il ressemble à ces jeunes branchés nouvelles technologies. Mais son salut est toujours religieusement incliné.
Nous abandonnons mon gros sac rempli de nos affaires communes à la réception de notre guesthouse qui le fera suivre jusqu'à Indein. Notre point d'arrivée, dans 2 jours et 1/2, si tout va bien...


Nous mettons d'abord le cap sur le marché local pour y acheter 2-3 petites choses qui manquent à Aung Aung pour les repas à venir. Je me demande ce qu'il 9906-Kalaw marketpeut bien emporter dans son tout petit sac à dos, visiblement plein d'espace libre. Le nôtre ne contient pas de nourriture mais notre nécessaire pour 3 jours. Il est plein à craquer... Le marché regroupe des gens des villages alentours. Les minorités ethniques comme on dit ici. Chaque village semble protéger farouchement sa culture propre. On peut donc identifier les origines des vendeurs à leurs vêtements, leurs turbans, leurs patois... C'est un formidable patchwork de couleurs tant devant que derrière les étals. Les senteurs se mélangent aux couleurs qui se mélangent aux voix pèle-mêles... Un joyeux n'importe quoi hétéroclite qui sollicite tous les sens. Parmi les fruits et les légumes, sur de nombreux étals, de petites enveloppes attendent que le postier vienne les ramasser. Nous nous laissons aller à quelques découvertes gustatives sur les conseils avisés de notre guide. Ses explications nous permettent d'identifier formellement la source d'une odeur nauséabonde qui incommode systématiquement Jess : une sorte de pâte noirâtre de chili et de restes divers de poisson.  Ça pue autant que ça pique une fois ingéré... Nombre de militaires arpentent le marché avec leurs sacs plastiques. On peut être bidasse et avoir besoin de faire ses courses...

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Vers 10h30, nous avons enfilé nos sacs et nous nous éloignons de Kalaw. Par un joli sentier plat et assez bien entretenu. Nous rejoignons rapidement la voie ferrée qui nous mènera jusqu'à la station de train où nous nous arrêterons ce midi. Cette 1ère étape n'était pas prévue mais la pluie abondante des jours précédents a rendu notre 1er itinéraire impraticable.
Nous alternons entre les rails et des petits chemins qui ne s'en éloignent que pour prendre un raccourci. La chanson de Cabrel en tête... "quand la nuit sera tombée sur la voir ferrée, on n'entendra que des notes et le bruit de nos bottes ...".
Les gens que nous croisons se sont échappés d'illustrations de livres d'histoire sur la culture birmane. Tous en longyi, promenant les enfants dans de grandes étoles qu'ils portent dans le dos. Agriculteurs au travail dans les champs ou emmenant leurs buffles d'eau dans un trou rempli par la pluie pour qu'ils se rafraîchissent. Tous arborent ce sourire radieux qui est la marque de fabrique du pays. 

 

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A la sortie d'un village, nous passons par une école. Les enfants profitent de la récréation pour s'amuser dehors. Beaucoups jouent à attraper avec leur cheville une ficelle que 2 camarades tiennent tendue au dessus de leurs têtes. Notre regard est capté par un jeune garçon habillé en moine, dont le bras gauche semble tatoué. En y regardant de plus près, nous comprenons qu'il s'agit d'une décalcomanie Il joue avec un gros scarabée qui s'accroche, les pattes écartées, sur son biceps nu. Il nous le montre fièrement et prend la pose avec quelques-uns de ses camarades. Nous avançons tant bien que mal au milieu de tous ces enfants qui nous sourient, nous saluent ou nous fuient par timidité. Tous portent le même uniforme blanc et vert des écoliers de Birmanie. Un moment d'échange, rafraîchissant sous le soleil bientôt au plus haut.  

 

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La train station est à peine 200m plus loin en contrebas. Si Walnut Grove avait une gare, elle ressemblerait à ça...  

C'est avec plaisir que nous y faisons halte. Aung Aung nous dit de nous installer à une table sur le quai. Sous une vieille bâche, nous sommes bien placés pour observer l'effervescence des cuisinières qui s'apprêtent à vendre leurs petits plats aux passagers du train qui passera dans 1h. Notre guide est en relation avec la femme qui nous prépare un poulet au curry sous nos yeux attentifs. Qui pourrait croire qu'une simple voie ferrée au milieu de nulle part puisse permettre à tout un village de prospérer?

 

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Nous nous abritons d'une petite averse à l'intérieur de la bâtisse où se trouvent quelques tables calmes du restaurant. Nous discutons avec Aung Aung et de fil en aiguille, la conversation nous mène sur le sujet tabou : Aung San Suu Kyi. Celle que l'on nomme discrètement "La Lady". Aung Aung nous dresse le portrait d'une femme qu'un peuple attend patiemment. Pour l'instant, les élections ne sont pas suffisamment transparentes pour lui permettre d'arriver au pouvoir. Mais de concession en concession, il nous explique que le gouvernement actuel ne pourra pas survivre à 2 élections. Le temps des compromis est arrivé et un jour, "La Lady" accédera au pouvoir. Il nous explique également que le petit barrage que nous avons passé un peu plus tôt est destiné à protéger les villageois qui, il y a quelques années, étaient entrés en conflit armé avec le gouvernement militaire. Le sol birman recèle de l'or et d'autres richesses exploitées sans ménagement. Les habitants de la région n'ont pas voulu se laisser déposséder de leurs terres et se sont battus pour elles.
Un couple de Suisses accompagné de leurs guides est installé un peu plus loin. Nous discutons un peu avec eux. Ils font un voyage autour du monde et nous parlent des villages qu'ils ont vus au cours de leur trek. Ils ne rejoignent pas le lac Inle comme nous mais ils font un trek sur 2 jours autour de Kalaw. Ils nous parlent de gens qui n'avaient jamais vu de blancs, de leur gentillesse et des scènes de vie qu'ils ont vues. En voyant que j'ai du tabac à rouler, ils me taxent 1, 2, 3 clopes. Puis un peu de tabac et plus de feuilles qu'il ne faut pour l'utiliser. Mon vécu me dit que ces 2 là ne sont pas venus que pour la chasse...

 

Le train n'arrivant pas, nous abandonnons le quai après que la pluie ait cessé. Nous reprenons notre marche tandis que la chaleur s'est faite plus moite. Show must go on! Le chemin monte lentement et régulièrement. Nous croisons le train bondé... qui annonce une bonne heure de retard :). Nous traversons essentiellement des champs dans lesquels on cultive le chou-fleur, le chili, la moutarde, la salade, le maïs, le tournesol, le riz et les pommes de terre. Les chemins de transforment en ornières boueuses que les bœufs et les chariots ont rendu piégeuses. 

 

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Jess continue de questionner Aung Aung sur son pays. Il nous explique tout ce qu'il peut de la religion, du mode de vie, des ethnies, du gouvernement. Il nous parle un peu de lui. Il est fan de Nirvana (ce que je trouve très drôle pour un bouddhiste). Il est marié à une femme qu'il connaît depuis l'enfance. Il étudie le Pãli, langue des 1ers textes bouddhiques encore utilisée aujourd'hui comme langue liturgique du bouddhisme en BIrmanie. Il s'est racheté une conduite dernièrement et a banni l'alcool et le cannabis de sa vie pour se rapprocher de la pensée de Bouddha. Il me confirme qu'il est possible de trouver de la marijuana dans certains villages. La Thaïlande étant limitrophe de la division (l'équivalent d'un département) voisine, certains villageois entretiennent un commerce avec les Thaïlandais. Je ne pense pas m'être trompé au sujet de mes petits-suisses-taxeurs-de-feuilles... ;).
En discutant, nous évoquons Paris et Aung Aung nous glisse que s'il gagne à la loterie, il fera un voyage et ira au Buddha Bar... Je ne suis pas certain que l'adresse corresponde à ses attentes ;).  

 

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En chemin, nous approchons de quelques buffles. Sous leurs airs placides, nous découvrons qu'ils n'aiment pas trop l'odeur des Européens. L'un d'entre eux écourtera une séance photo prometteuse en commençant à humer profondément l'air et en tapant du sabot. Je ne veux pas me brouiller avec un buffle xénophobe, je tourne les talons, non sans lui expliquer que je ne peux être d'accord avec ses idées rétrogrades. Le petit Français qui pue ne te prendra plus en photo!

 

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Vers 18h, nous atteignons le village où nous allons dormir. Heureux de poser nos sacs après 6h de marche. Nous pénétrons dans une cour entre 2 petites maisons en palmes et en bambous. Toutes deux sont sur-élevées par un mur de briques ou sur pilotis. Le rez-de-chaussée sert à entreposer du matériel tandis que l'étage est réservé à l'espace de vie. La bicoque de droite abrite la cuisine/salle à manger. Celle de gauche, la chambre et le "living room". La maîtresse de maison, que nous appelons la "grand-mère", nous prépare une petite paillasse et quelques couvertures dans la plus grande des 2 pièces. Nous comprenons qu'elle est couturière aux 2 vieilles machines qu'elle a disposées face aux fenêtres. Nous restons un moment assis à nous familiariser avec cette maison sobre et rustique. Les Birmans ne passent que peu de temps à l'intérieur. Ils n'utilisent leurs habitations que pour manger et dormir.

Nous rejoignons Aung Aung dans la cuisine. Il nous prépare le repas à la lumière de sa frontale car il n'y a pas encore d'électricité dans cette région. Mais le gouvernement y travaille. Il a déjà fait une route qui permet d'aller plus facilement à Kalaw. Notre guide connaît la famille qui nous accueille car ce sont des amis de ses grands-parents. Les odeurs d'épices mijotant dans les casseroles au milieu des braises emplissent la pièce.
Un homme fait son apparition dans l'encadrement de la porte. Il s'agit du mari de la "grand-mère-maîtresse-de-maison". Il sourit à pleines dents avant de s'asseoir avec nous. Il nous annonce directement "I drink a little bit!" nous laissant juger le "little bit" par le petit espace qu'il laisse entre son index et son pouce. Il nous explique dans un anglais un peu confus qu'il a beaucoup travaillé démontrant sa fatigue par un gros soupir et sa tête lasse. Donc, il nous répète que c'est pour cela qu'il a "bu juste un petit peu!". Sa femme refait son apparition dans la pièce, l'air mécontent. Papy nous lance alors un joyeux "this is my wife!...". Silence réprobateur de l'intéressée. Il continue alors, comme si une évidence venait de s'abattre lourdement sur lui, "she's beautiful!...". La femme semble connaître son manège par cœur et détourne les yeux. "But she has no brain...". Le malicieux papy est d'emblée intéressé par notre trek. Qui sommes nous, d'où venons nous, sommes nous mariés, comment ça pas mariés, aimons nous la Birmanie... Il a 67 ans et il travaille toujours dur. Il a 10 ans de plus que son épouse. Ils vivent avec leur fille, son mari et leurs 2 enfants.
Aung Aung nous demande de rejoindre notre pièce pour qu'il puisse nous servir le repas. Nous quittons les lieux et notre couple d'hôtes. Nous découvrons les talents de cuisinier de Aung Aung. Sa grand mère lui a tout appris. Il nous parle beaucoup de ses grands-parents avec toujours un respect profond dans les termes qu'il choisit pour les évoquer. Il aimerait les faire voyager car ils n'ont jamais quitté leur village. Ils ne connaissent même pas Bagan et il voudrait qu'ils voient ça avant de mourir. Il y a des vies qui font relativiser.

9927-Trek Kalaw/ Indein jour 1Après le dîner, papy joyeux refait son apparition et ne tarde pas à s'installer à notre table au ras-du-sol. Seule une bougie nous éclaire dans la fraîcheur de la nuit. Il n'est plus sous l'emprise de son alcool de riz ingurgité quelques heures auparavant. La discussion avec madame a dû le faire redescendre rapidement...
Nous parlons de notre voyage autour du monde, de la Mongolie encore très présente dans nos souvenirs. Il nous demande s'il y a des bouddhistes là-bas. Nous lui répondons que oui, mais que les rites sont différents. Nous lui montrons quelques photos de Khakhorin et des stupas que nous y avons vus. Il nous explique qu'il y a plusieurs sortes de  bouddhisme :  Mahãyãna, la version moderne (tout être sensible a en lui la nature de Bouddha et est capable de transmettre sa pensée) comme celui des Mongols et Theravãda, la version orthodoxe (on peut atteindre l'éveil en tant qu'auditeur de Bouddha) comme en Birmanie.
La question qui nous brûle les lèvres depuis un moment finit par être posée. Le bouddhisme est-il une religion ou une philosophie? Aung Aung est un fervent supporter du Bouddha philosophique. Il nous explique le fruit de ses études et de ses convictions pendant que papy chausse ses lunettes et sort 3 livres qui expliquent tout. J'ai, moi-même le "Que sais-je? Le Bouddhisme" que j'ai commencé à lire de loin en loin. Je retrouve dans les explications de ce soir les idées vagues du livre. La vie est une souffrance, la souffrance est provoquée par la soif de vivre, il faut se détacher de la soif pour ne plus souffrir, il faut suivre 7 préceptes pour y parvenir (parole sincère, pensée sincère, mémoire sincère...). Nos enseignants du soir sont intarissables sur les textes qu'ils nous montrent. Ils nous expliquent que dans la philosophie de Bouddha, rien n'arrive par hasard, il y a toujours une cause responsable d'un effet. La sérénité s'est invitée à notre table. Nous écoutons consciencieusement nos 2 sages nous démontrer que cette philosophie trouve des applications quotidiennes dans leurs existences.
Nous devisons jusqu'à 22h avant de nous coucher bercés par les bruits de la campagne toute proche. Je sens que le voyage nocturne de Jess ne sera pas de tout repos car les toilettes sont à l'autre bout du potager. Un modèle "mongol" qu'elle avait tant aimé, auquel on accède par un étroit chemin boueux à la végétation dense...  

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Publié dans carnet de route

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J
<br /> Voilà, voilà... ça vient !<br /> Tu nous as bien faits rire... mais aussi réfléchir (si,si!) ! On n'avait pas pensé à créer du suspense comme ça entre les articles avec des événements tellllllllement forts et intéressants que le<br /> lecteur reste en suspend et en redemande ! T trop forte :=)<br /> Lis l'article suivant, tu auras tes réponses... et de nouvelles questions! Bisous !<br /> <br /> <br />
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L
<br /> alors ??? on a plus rien depuis samedi la ...j'ai troqué mon livre de chevet pour le blog ... alors qu'est ce qu'il s'est passé ensuite ?<br /> je commence a m'inquieter ... jess est elle revenue de sa promenade nocturne a l'autre bout du potager ???<br /> <br /> <br />
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